La forte variabilité climatique naturelle expliquerait majoritairement l'évolution observée des précipitations méditerranéennes
- Catégorie : Veille changements climatiques
Une récente étude approfondie publiée dans la revue Nature s’est penchée sur l’évolution des précipitations en Méditerranée au cours des 150 dernières années (1871-2020). Contrairement à l’idée largement répandue d’une diminution progressive des précipitations dans cette région, les résultats montrent que ces changements sont avant tout dominés par une forte variabilité naturelle, et non par une véritable tendance à la baisse.
Approches innovantes et comparaisons avec les modèles climatiques
L’étude s’est distinguée par sa méthode innovante d’analyse collaborative des données, permettant d'utiliser un imposant volume d’informations météorologiques malgré des restrictions de partage imposées par certains pays. Elle a comparé les observations avec les projections des modèles climatiques CMIP5 et CMIP6.
Les modèles les plus récents (CMIP6) reflètent plus fidèlement les observations climatologiques historiques que leurs prédécesseurs (CMIP5), tout en continuant à projeter une potentielle diminution des précipitations sur le long terme, en particulier dans les scénarios d’émissions élevées de gaz à effet de serre.
Stationnarité globale des précipitations
Malgré des fluctuations importantes d’une année ou d’une décennie à l’autre, les précipitations méditerranéennes n’ont pas montré de changement significatif sur le long terme. L’analyse de données provenant de plus de 23 000 stations météorologiques dans 27 pays révèle que :
- Moins de 15 % des stations affichent des tendances significatives sur des périodes courtes (par exemple, 1951-2020).
- Les tendances saisonnières sont tout aussi variables, avec peu de résultats probants sur des longues périodes
Le central de la variabilité atmosphérique
La dynamique atmosphérique, notamment les oscillations climatiques comme l’Oscillation Nord-Atlantique (NAO) et l’Oscillation Méditerranéenne (MO), joue un rôle prédominant dans les changements de précipitations. En particulier :
- En hiver, ces facteurs expliquent une grande partie des fluctuations
- La portion de cette variabilité qui reste inexpliquée conserve un caractère stationnaire, ce qui renforce l’idée que la dynamique naturelle est la cause principale des évolutions observées
Contribution limitée du forçage anthropique
Bien que le changement climatique marque la région par des températures croissantes, l’impact direct des activités humaines sur les précipitations reste moins perceptible. L’effet attendu se manifeste plutôt de manière indirecte, via des modifications des systèmes atmosphériques
Aridification à cause de l’évaporation
Même si les précipitations n’ont pas significativement diminué, la région connaît une aridification croissante. Ce phénomène est dû à une augmentation de la demande évaporative de l’atmosphère sous l’effet de la hausse des températures, ce qui pourrait être aggravé par une éventuelle baisse future des précipitations projetée par les modèles climatiques
Cette recherche souligne un point essentiel : depuis 150 ans, ce sont les aléas naturels et la dynamique atmosphérique qui dictent les précipitations en Méditerranée. Si les modèles prévoient une diminution des précipitations à venir, ces impacts futurs ne sont pas encore explicitement détectables dans les données historiques. Enfin, l’étude met en avant l’importance de disposer de séries temporelles longues et fiables pour mieux comprendre les évolutions climatiques actuelles et futures.
En résumé, même sans tendance notable à la baisse des précipitations, la Méditerranée doit faire face à de sérieux enjeux liés aux changements climatiques, notamment l’aridification croissante et ses effets sur les ressources en eau et les écosystèmes.
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