Météo-France a rassemblé dans un rapport intitulé « À quel climat s’adapter selon la TRACC ? » une synthèse scientifique en deux parties décrivant le futur climatique de l’Hexagone et de la Corse. Il s’agit d’un document à vocation pédagogique pour faciliter la prise en compte de la Trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC) par tous les acteurs de l’adaptation.
Vers une France à +4 °C
Le réchauffement moyen en France hexagonale et en Corse, attribué au changement climatique en 2023, est de +1,7 °C par rapport à la période préindustrielle et de nombreux effets sont déjà visibles. Ils influencent profondément l'ensemble des activités et des territoires. Sans renoncer aux efforts d’atténuation consistant à limiter les émissions de gaz à effet de serre liées aux activités humaines, il est nécessaire de préparer nos sociétés à une aggravation du changement climatique.
En effet, l’Europe se réchauffe plus vite que la moyenne planétaire. Ces niveaux de réchauffement se traduiraient en France hexagonale et en Corse par une hausse des températures moyennes de :
- +2 °C en 2030 ;
- +2,7 °C en 2050 ;
- +4 °C en 2100.
Températures et précipitations : à quoi s’attendre en 2100 ?
Dans une France à +4 °C, la température moyenne annuelle s’élèvera à 14,2 °C (contre 10,9 °C sur la période 1976-2005). Elle pourrait même atteindre des pointes à 15 °C sur l’agglomération parisienne, ce qui correspond au climat actuel de la région de Montpellier, et grimper au-delà de 18 °C sur la moitié sud, climat actuel de l’Andalousie.
Contrairement aux températures, l’évolution des précipitations présente des incertitudes importantes. À l’échelle annuelle, la valeur moyenne du changement est généralement faible avec une légère augmentation sur le quart nord-est du pays et une baisse dans le sud-ouest. Au niveau saisonnier, les contrastes se renforceraient : +15 % de précipitations en hiver en moyenne et -20 % en été.
Au-delà des évolutions moyennes, la variabilité interannuelle, c’est-à-dire les différences d’une année à l’autre, se maintiendra, voire se renforcera. En d’autres termes, si les valeurs moyennes du futur peuvent ressembler parfois aux valeurs extrêmes d’aujourd’hui, les « records » de demain seront bien plus sévères. En matière de température, l’année record 2022 deviendra à l’horizon 2100 une référence exceptionnellement fraîche tandis que des années plus chaudes de 2 °C à 3 °C en moyenne sont attendues.
Des extrêmes plus sévères
Des étés de plus en plus caniculaires
Les températures extrêmes ont des impacts importants sur la santé humaine, la biodiversité et sur de nombreuses activités socio-économiques.
Les étés futurs seront plus chauds que tous ceux connus jusqu’à aujourd’hui. Des températures supérieures à 40 °C pourront se produire tous les ans et des records de chaleur pourraient atteindre localement jusqu’à 50 °C. Il faut s’attendre à 10 fois plus de jours de vague de chaleur à l’horizon 2100.
Les régions méditerranéennes, habituées à des températures élevées, connaîtront ces épisodes de manière de plus en plus fréquente et durable. Les nuits chaudes, au-delà de 20 °C, seront la norme, avec jusqu’à 120 nuits par an sur le littoral méditerranéen.
À l’inverse, le nombre de jours de gel se réduira à une quinzaine de jours en moyenne sur la France. Dans les régions littorales et le sud, les gelées deviendront rares (seulement quelques jours par an) avec, cependant, un risque de dégâts importants si elles se produisent à des stades végétatifs plus avancés.
Des pluies intenses plus fortes
L’évolution des pluies intenses peut avoir des conséquences importantes sur les risques d’inondation par ruissellement et concerne de nombreux secteurs comme l’urbanisme, les transports ou l’agriculture via l’érosion des sols. Au-delà de l’augmentation des températures et notamment des extrêmes chauds, le changement climatique renforce globalement les pluies intenses.
Ainsi, dans une France à + 4 °C, les pluies intenses se renforceront, avec +15 % en moyenne et jusqu’à +20 % sur la moitié nord du pays, aggravant le risque d’inondation, notamment dans les secteurs fortement imperméabilisés comme les villes.
Diminution de la ressource en eau
La ressource en eau est essentielle pour de nombreux usages (eau potable, agriculture, industrie, énergie) ainsi que pour les milieux naturels. Avec l’augmentation des températures et l’évolution saisonnière du cumul de précipitation, le changement climatique a de fortes conséquences sur le cycle de l’eau et la ressource en eau disponible.
L’évapotranspiration potentielle de la végétation augmentera fortement à l’échelle de la France (+ 20 %). La baisse du bilan hydrique s’accentuera, de façon plus marquée dans les régions méridionales avec des pertes d’eau supérieures à 200 mm par an, ce qui représente un tiers du cumul annuel de précipitations en moins.
Davantage de sécheresse
Toujours dans le contexte d’un niveau de réchauffement à +4 °C, la France connaîtra 1 mois supplémentaire de sol sec dans la moitié nord et jusqu’à 2 mois dans la moitié sud. Les sécheresses deviendront fréquentes en été et se poursuivront souvent en automne. Une sécheresse comme celle de 2022 deviendra un événement ordinaire en été. Certains événements de sécheresse pourront même s’étaler sur plusieurs années consécutives.
Un risque de feux de forêt généralisé
Sous l’influence principale de l’augmentation de la température, qui accentue la sécheresse de la végétation, le changement climatique entraîne une aggravation du risque météorologique de feux de forêt. En 2022, 90 départements de l’Hexagone ont été concernés par au moins un feu significatif.
Pour un niveau de réchauffement en France à + 4 °C, les feux de forêt et de végétation, déjà fréquents dans le sud, gagneront du terrain, avec un risque élevé qui s’étendra régulièrement à tout le territoire. Ainsi certaines régions de la moitié nord (régions de la Loire au Bassin parisien) connaîtront un risque de feu élevé selon des fréquences rencontrées à ce jour sur l’arrière-pays méditerranéen. Quant aux régions méditerranéennes, le nombre de jours de risque élevé sera multiplié par deux. Enfin, la saison de risque élevé ou modéré de feux s’allongera de 1 à 2 mois dans certaines régions.
L’enneigement en baisse
La présence de neige en montagne est importante pour la ressource en eau. Or, dans un climat plus chaud, il y aura de plus en plus d’hivers peu enneigés même si cela pourra fortement varier d’une année à l’autre.
Dans une France à + 4 °C, le nombre de jours de neige au sol en hiver (enneigement supérieur à 5 cm) se réduira drastiquement sur tous les massifs.
En moyenne montagne, la saison d’enneigement continu deviendra inférieure à 2 mois, avec des conséquences multiples sur les activités et les milieux naturels.
L’urgence d’adapter notre société
Face à ces dérèglements, l’atténuation et l’adaptation sont essentielles : gestion de la ressource en eau, protection des forêts, amélioration des infrastructures et réponse aux risques. Ce rapport souligne l’importance de nous préparer dès maintenant à un climat différent avec des extrêmes plus sévères.